mardi 1 juillet 2014

Internet et la mondialisation, par Pierre Bellanger

Pierre Bellanger, la Souverainté numérique
Pierre Bellanger, la Souverainté numérique
Pour un pays avancé, l’Internet et la mise en réseau de son industrie sont la seule réponse viable à la mondialisation. En effet, il faut considérer la mondialisation comme un réseau en soi. Une nation avancée, ou un groupe de nations, parce qu’elles forment ensemble un réseau plus efficace et plus rapide, peuvent dès lors prospérer par la mondialisation plutôt que de s’y appauvrir du fait du rééquilibrage global des niveaux de vie. Les gains de productivité, pour les salariés et les entreprises, sont tels qu’ils changent la donne.
Encore faut-il maîtriser cette mise en réseau. Et ne pas la laisser à des résogiciels exogènes qui ne feront que transférer ailleurs la valeur encore subsistante ici. Plus un secteur économique fonde sa valeur sur l’information et son traitement, plus il est vulnérable au déplacement de cette valeur vers le résogiciel. Le secteur primaire d’extraction des ressources (agriculture, pêche…) est le moins directement menacé. Le problème se pose dès le secteur secondaire (tous les métiers de fabrication et de transformation de la matière : de l’aéronautique à la production d’énergie). Le secteur tertiaire est attaqué encore plus directement. L’Internet automatise les services. Certains de ses services étant rétrogradés à l’état de prestataires interchangeables ou tout simplement substitués.
(…)
Nous traversons depuis 2008 une crise bancaire et financière qui a ébranlé nos économies et en a effondré certaines. Le choc fut tel et les remèdes si douloureux que tous nos efforts et notre attention se sont focalisés sur ce drame collectif. La traversée de cette épreuve au quotidien a été notre seule obsession et notre principale grille de lecture. C’est à cette dépression que nous avons attribué tous nos maux et, par conséquent, nous avons formé l’espoir de les voir disparaître une fois sortis d’affaire. C’est une erreur. La récession a masqué des causes plus profondes, des mutations plus graves qui aujourd’hui montent en puissance et fondent l’atypisme de la sortie de crise actuelle.
Pourquoi l’emploi ne redémarre-t-il pas avec la vigueur d’autrefois lorsque s’achevait une tourmente ? Pourquoi rien ne semble vouloir arrêter l’évidement progressif de la classe moyenne s’érodant majoritairement dans la précarité, et même la pauvreté, tandis que seuls quelques uns s’échappent par le haut ? (…) La réponse est claire. Il ne s’agit pas seulement du coût du travail des pays émergents – d’ailleurs en augmentation -, il s’agit également de la compétition accrue des machines, de l’automatisation des algorithmes. L’Internet, et les résogiciels qui en sont les écosystèmes combattants, vont bouleverser nos services, notre industrie, notre administration et notre société tout entière.
Pierre Bellanger, La souveraineté numérique. Stock janvier 2014.

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